Les Tchèques vers la légalisation

Les Tchèques vers la légalisation

En République tchèque, le cannabis poursuit sa route vers la légalisation avec une étape importante franchie au début du mois de juin lorsque les députés ont adopté un projet de loi sur la culture de la plante à domicile, qui vient d’être agréé par le Sénat. La dernière étape législative est désormais la validation présidentielle dont les défenseurs du cannabis souhaitent qu’elle intervienne dans les plus brefs délais.

 

Depuis son annexion par l’URSS après la Seconde Guerre mondiale, la Tchécoslovaquie a toujours été un élève indiscipliné, tourné vers l’émancipation et ce dès 1956 avec le fameux Printemps de Prague. Débarrassé du joug soviétique en 1989, le pays s’est constitué quatre ans plus tard en deux nations indépendantes, la Tchéquie (ou République tchèque) et la Slovaquie, qui ont conservé cet esprit de dissidence. Rien d’étonnant, donc, à ce que le cannabis n’y rencontre pas d’hostilité particulière comme dans d’autres pays d’Europe où il représente parfois un véritable tabou depuis des lustres. Pour preuve, la République tchèque a légalisé le cannabis thérapeutique voilà déjà douze ans, en date du 1er avril 2013, mais elle avait avant cela, en 2010, plus ou moins dépénalisé la détention d’une quantité inférieure à 15 grammes de cannabis récréatif en la considérant comme une simple infraction civile et non plus un délit. Depuis ce temps, les autorités toléraient dans les faits la possession d’une telle quantité de marijuana, mais aussi jusqu’à 5 grammes de résine sans nulle sanction à la clé.


Poursuivant sur sa lancée, la République tchèque avait, par la voix de députés favorables à la légalisation du cannabis récréatif présenté plusieurs projets de loi les années suivantes, sans qu’aucune ne soit néanmoins validée. Ceci, jusqu’au mois dernier où la Chambre des députés a adopté le 5 juin par 142 voix sur 159 députés présents lors de la cession un projet de réforme des lois sur les drogues. Ce dernier envisageait dans ses grandes lignes de légaliser la possession et la culture à domicile de marijuana et d’autoriser la psilocybine, un alcaloïde qui constitue le principe actif de certains champignons hallucinogènes, dans le cadre de traitement médicaux. L’idée pour les promoteurs de cette réforme était de réduire les dépenses pour les infractions peu prioritaires et le nombre de délinquants emprisonnés pour des affaires de drogue mineures : « L’amendement aidera le droit pénal à mieux faire la distinction entre les comportements véritablement socialement nuisibles et les affaires qui n’ont pas du tout leur place dans les procédures pénales », avait ainsi déclaré le ministre de la Justice, Pavel Blažek.


Le cannabis récréatif est désormais à une signature de la légalisation, qui devrait intervenir avant la fin du mois de juillet.


La semaine dernière, le projet de loi a franchi la seconde étape légale qui consistait à obtenir sa validation par les sénateurs. Ceux-ci ont également donné leur approbation à la nouvelle proposition le jeudi 3 juillet, avant l’étape finale qui sera matérialisée par la signature du président de la République tchèque Petr Pavel. Dans le détail, le projet de loi en route vers le bureau présidentiel légalise la possession à domicile d’un maximum de 100 grammes de cannabis récréatif et de 25 grammes dans l’espace public. Il autorise également la culture par foyer de trois plants de marijuana au plus, quatre ou cinq plants étant considérés comme un délit et comme un crime au-delà de cette quantité. Du côté de la détention de cannabis, des sanctions pénales seraient appliquées au-dessus de 200 grammes, mais rien n’a été précisé pour les quantités comprises entre 100 et 200 g. En effet, le projet initial prévoyait des sanctions pénales au-dessus de 100 g, mais c’est le ministre Blažek lui-même qui a plaidé pour un seuil de 200 g, la culture de trois plants pouvant produire une telle quantité.


Le projet de loi était principalement porté par la députée du Parti démocratique civil Zdenka Crkvenjaš qui avait déclaré début juin, lors de l’adoption par la Chambre, que celle-ci signifiait « la fin des poursuites inutiles contre les personnes âgées qui cultivent du cannabis à des fins médicales ». Du côté du parti des Pirates, qui défendent depuis toujours la légalisation du cannabis, la satisfaction était également de mise, notamment par la voix du député Jakub Michálek qui a jugé l’approbation du projet « raisonnable et conforme à la réalité » et a ajouté : « Quand quelqu’un cultive du cannabis – et je ne porte bien sûr aucun jugement en la matière – cela se produit, tout simplement. Je ne pense pas dans ce cas-là que la répression soit une bonne chose ». Certains amendements plus ambitieux avaient toutefois été rejetés en commission lors de la présentation du projet et notamment la possibilité d’ouvrir des clubs ou des établissements spécialisés, comme cela se fait dans la plupart des pays où le cannabis récréatif a été légalisé.

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